Grenoble bannit la publicité de ses espaces publics.

Fin 2014, le contrat avec la société JC Decaux vient à échéance et la municipalité écologiste grenobloise a décidé de ne pas relancer d'appel d'offre pour de l'affichage publicitaire. Ce sont ainsi 326 panneaux qui, en l'espace de 4 mois, seront démontés, soit quelque 20.151 m2 d'espace (publicitaire) récupérés. A leur place, la ville plantera des arbres et offrira des espaces d'expression citoyens. Seuls resteront encore les affichages publicitaires sur les abribus, ce contrat ne venant à échéance qu'en 2019. L'annonceur JC Decaux, dont les contrats avec Grenoble sont renouvelés depuis 1978, déplore la perte pour le citoyen d'un espace d'information… Depuis quand la publicité est-elle informative ? Pour mémoire, la publicité n'est pas là pour informer le citoyen mais bien pour vendre des produits à des consommateurs. Nuance… Pas de panique pour l'information du citoyen donc : à partir de janvier, la municipalité rencontrera les acteurs locaux (associations, acteurs culturels) pour "convenir avec eux des meilleurs lieux d'implantation du futur dispositif" pour l'affichage libre, culturel et municipal. Qui perd gagne. Sur le plan financier, JC Decaux indique que la ville se privera ainsi de 6 millions de redevances sur 10 ans. De fait, la publicité représente des rentrées financières non négligeables et certains se sont émus de ce soudain déficit de 600.000 · annuels. Le maire, Eric Piolle, rassure pourtant : d'abord, les recettes publicitaires ne sont plus ce qu'elles étaient. Internet entrant en concurrence directe avec l'affichage, les recettes annuelles n'auraient plus été que de 150.000· par an. Ensuite, le différentiel sera largement compensé par des économies sur le budget du protocole, déjà engagées en 2013 et 2014. On notera au passage que la ville a déjà économisé 190.000· en vendant 15 véhicules de fonction, remplacés par des vélos. 5 voitures restent à disposition des élus pour les longs trajets. La question financière est cruciale dans le chef des gestionnaires d'une ville. En effet, les sociétés publicitaires sont très convaincantes quand il s'agit de négocier la présence de panneaux publicitaires dans l'espace public. Ainsi, les Déboulonneurs de pub dénoncent le fait que des élus locaux à l'échelle nationale acceptent la présence de panneaux publicitaires sur la voie publique en contrepartie de redevances et de l'aménagement des espaces publics avec abribus et autres mobiliers urbains… Des émules chez les élus On ne peut donc que saluer le courage de la décision grenobloise. Peut-être créera-t-elle un appel d'air qui amènera d'autres municipalités à tenter l'expérience ? Bordeaux souhaite suivre la même voie et se prépare à interdire les panneaux de 12 mètres carrés . En matière de chasse à la pub dans l'espace public, Lille n'a pas attendu la mairie pour prendre des initiatives de désobéissance civile dont … les élus sont prêts à s'inspirer ! et Forcalquier (Haute-Provence) a fait disparaître la publicité de ses rues touristiques, soutenue en cela par son rattachement au parc régional du Luberon en 2009. Le tourisme peut aussi être un levier de changement. Cela demande sans doute réflexion, anticipation et imagination pour repenser la gestion des finances publiques à l'échelle d'une ville mais Grenoble a le mérite de poser un acte fort et subversif, qui questionne les modèles établis de longue date et montre que les villes peuvent sortir des sentiers battus pour tendre vers l'exemplarité. Et si, au final, la créativité payait plus que la publicité ?