Possible destruction « chimique » de 30% des poires belges

Ce mercredi 27 août, les autorités fédérales ont autorisé les producteurs de poires à faire tomber artificiellement une partie de leur récolte à l'aide du produit chimique ethefon, pour détruire les fruits par la suite. En effet, avec le boycott de l'importation par la Russie, la production de poires est devenue trop importante. Mettre tous les fruits sur le marché intérieur ferait baisser dramatiquement les prix. Or, les producteurs de fruits recevront une compensation pour la récolte détruite, ce qui rend cette dernière option plus intéressante pour eux que de les vendre à grande perte.

Cette décision soulève de vifs débats pour plusieurs raisons. Non seulement, le gaspillage de quelque 30% de la récolte de poires suscite l'indignation. Rappelons, de surcroît, que 2014 est tout de même l'année européenne de lutte contre le gaspillage alimentaire... Par ailleurs, leur récolte artificielle à l'aide d'une substance toxique pose question. Idem pour la dépense d'argent public à ces fins. Enfin, certains juristes contestent la légalité même d'une telle mesure pour éviter une baisse des prix.

Mais la problématique va plus loin que ces questions immédiates. Elle montre la fragilité d'un système basé sur la spécialisation excessive, la production à grande échelle d'une seule culture destinée à l'exportation massive (la Belgique exporterait 70% de ses poires, dont la moitié vers la Russie). Difficile dans ces circonstances de rebondir rapidement quand un grand client ferme ses frontières.

Ne faudrait-il pas plutôt une politique qui encourage la création de fermes plus diversifiées, produisant de manière respectueuse de l'environnement, tournées en premier lieu vers les besoins locaux et offrant une rémunération équitable à l'agriculteur ? Selon l'association flamande Wervel, qui œuvre pour une agriculture plus juste et responsable : " Cette crise est l'occasion de remettre en question notre système agricole."

Comme la Flandre compte beaucoup plus de producteurs, le nord du pays est davantage concerné. Les producteurs wallons se retrouvent toutefois face à la même question : détruire ou vendre à perte ? Des concertations entre tous les acteurs du secteur sont en cours pour envisager d'autres pistes qui permettraient de limiter les dégâts : primes pour éviter la destruction, vente de la récolte via d'autres circuits… Mais vu les délais serrés, une réorganisation de la vente n'est pas toujours facile à organiser. Ceci dit, les efforts pour la promotion des poires belges se voient déjà récompensés : les grandes surfaces auraient constaté une augmentation de la vente de poires de quelque 50%.

Photo : Rena Tom, sur flickr