C’est quoi le problème avec le plastique ?

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Le plastique n'est pas vraiment écologique ni sain. Pourquoi ? Omniprésence, déchets, pollution... On fait le point sur les problèmes liés au plastique.

On utilise beaucoup trop de plastique et celui-ci a des impacts négatifs sur l’environnement et la sur la santé. Mais encore ? Que reproche-t-on exactement au plastique ?

Sommaire :

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On utilise trop de plastique (jetable)

Le plastique c’est pratique : il est léger, il résiste à différents éléments (eau, chaleur, froid…), il peut prendre des formes variées (textiles, bouteilles, plats, isolants, revêtements de sol, etc).[1] Du coup, on l'utilise pour de nombreux usages.

Certes, le plastique n’est pas écologique. Mais si on le réservait à quelques utilisations, il ne poserait pas tant de problèmes. Le souci c’est qu’il est omniprésent et souvent utilisé pour des objets à usage unique, qui génèrent beaucoup de déchets encore assez mal gérés.

La production de plastique a été multipliée par 20 depuis les années 60. Ce n’est pas étonnant, on utilise le plastique un peu partout : emballages, ustensiles de cuisine, récipients divers, tableaux de bord, matériel électrique et électronique, déco, meubles, jouets, etc.

Quelques exemples d’utilisation des matières plastiques dans la maison :

Où utilise-t-on du plastique chez soi ?
Source : brochure Le plastique, c’est pas automatique, écoconso.

Les emballages représentent 40% du plastique utilisé en Europe tous les ans. [2] Par emballage, on entend tout ce qui est films plastique, blisters, barquettes, raviers, pots, bouteilles, etc.

Or, l’emballage a une durée de vie courte et devient donc assez rapidement un déchet.

Le plastique sert en premier lieu à fabriquer des emballages
Source : PlasticsEurope.

Les emballages ne sont pas les seuls à avoir une courte durée de vie. On pourrait aussi citer les objets de mauvaise qualité (jouets, déco, gadgets, électroménager…) et les objets en plastique à usage unique. 47% des déchets de plastiques retrouvés dans la mer sont d’ailleurs des objets en plastique à usage unique ! [5]
 

Produire du plastique nécessite beaucoup de pétrole

Pour fabriquer du plastique, on utilise beaucoup de pétrole, une ressource non-renouvelable. Il faut 2kg de pétrole brut pour produit un kilo de PET, le plastique dont sont en général composées les bouteilles. [6]

Le pétrole est utilisé :

  • comme matière première ; [7]
  • pour le processus de production. Notamment pour faire fonctionner les machines, transporter les produits finis…

Actuellement, on estime que 6% du pétrole utilisé dans le monde sert à fabriquer du plastique. Un chiffre qui devrait grimper à 20% d’ici 2050. [8]

Cela traduit bien l’augmentation de la consommation de plastique. Et quel gaspillage quand on sait que le premier usage du plastique, ce sont des emballages (à durée de vie très courte). Et, contrairement à ce que l’on pense, le plastique est assez peu recyclé.

> Lire aussi : Moins de plastique pour moins de CO2.
 

Le recyclage n’est pas la panacée

.Le recyclage des matières plastiques reste problématique pour plusieurs raisons :

  • On collecte trop peu de plastique. Sur les 26 millions de tonnes de déchets plastiques produits par an en Europe[9], seulement 30% sont récupérés pour être recyclés. [10] Si on se limite à regarder les plastiques d’emballage ménagers (bouteilles, films, raviers…), le résultat est meilleur : le recyclage est de 42% en Europe [11] et de 38% en Belgique. [12] Il n’en reste pas moins que 70% des déchets de plastique ne sont pas recyclés et sont donc enfouis ou incinérés. [13]
     
  • Le recyclage n’a pas un rendement de 100%. Il y a toujours des pertes dans le processus : une tonne de plastique collecté ne permet jamais de produire une tonne de plastique recyclé. On calcule pourtant les chiffres de recyclage sur base de ce qui est fourni aux entreprises de recyclage, pas sur les tonnes de matières recyclées produites.
     
  • Les objets en plastique sont parfois recyclés sous forme d’objets non recyclables. Par exemple, on peut fabriquer des baskets ou des pulls à partir de bouteilles recyclées. Mais actuellement, ces objets n’ont pas de filière de recyclage. Autrement dit, si on fabrique un textile à partir de bouteilles, le plastique ne sera en fait recyclé qu’une seule fois.[16]
     
  • La diversité et la composition des plastiques complique le recyclage. On ne recycle pas tous les plastiques de la même façon. Or, un même plastique (du PET, par exemple) peut avoir différentes compositions. Et de nombreux objets sont aussi composés de plusieurs plastiques, qu’on ne sépare pas toujours (par exemple une barquette et son opercule ou une bouteille et son bouchon).
     
  • La qualité du plastique recyclé est très influencée par la qualité des déchets. La qualité du plastique recyclé est un des très gros points d’attention quand on parle de recyclage des plastiques. Un rapport européen a mis en avant la présence de retardateurs de flammes [17] dans des jouets fait avec du plastique recyclé. [18] De manière générale, le recyclage est influencé par les additifs utilisés lors de la fabrication du plastique [19] ou par ce que l'emballage a contenu. Par exemple, les bouteilles de lait en PET opaque ne sont pas recyclables à cause de la charge utilisée pour les rendre opaques. Ou les bouteilles de ketchup sont difficiles à recycler car le plastique devient jaune au recyclage.[20]  La question est encore plus épineuse lorsqu’il s’agit de produire des emballages destinés à contenir des aliments.[21] D’ailleurs, on n’arrive pas encore vraiment à fabriquer des bouteilles en plastique à base de 100% de déchets de bouteilles en plastique. [22] La situation devrait changer avec l’obligation européenne d’avoir 25% de plastique recyclé dans les bouteilles à l’avenir. Il deviendra important d’avoir suffisamment de déchets de plastique de bonne qualité et donc de potentiellement faire des bouteilles de boisson en plastique 100% recyclé.[23]
     
  • Le plastique est loin d’être recyclé localement. Les emballages en plastique collectés en Belgique (le sac bleu) sont recyclés dans les pays frontaliers.[24] Mais cela laisse pas mal d’autres plastiques à traiter et recycler. 50% des déchets de plastique européens collectés pour recyclage sont exportés en dehors de l’Union européenne.[25] La Belgique est dans le top 5 des pays exportateurs de déchets de plastique au niveau mondial, selon Greenpeace.[26]  Beaucoup de ces déchets de plastique étaient envoyés en Chine. Mais la Chine a revu ses critères de qualité pour l’importation de déchets. Faute d’infrastructure de recyclage (entre autres), de nombreux pays, comme les Etats-Unis, se retrouvent parfois à devoir incinérer des plastiques pourtant triés par ses habitants.[27] D’autres pays ont pris la relève de la Chine, comme la Turquie, l’Inde, Taiwan ou la Corée du Sud. Depuis les restrictions d’importations chinoises, la Turquie est devenue l’un des dix plus grands importateurs internationaux de déchets, principalement du Royaume-Uni, de Belgique et d’Allemagne.[28] Mais ces pays pourraient très bien faire comme la Chine. La Malaysie, qui avait vu ses importations de déchets de plastique augmenter, vient d’ailleurs d’annoncer des restrictions.[29]

Certains défendent l’idée qu’il serait plus efficace de brûler le plastique (et d’en récupérer la chaleur pour produire de l’énergie) plutôt que de le recycler. Ça paraît logique puisque le plastique est fait à base de pétrole. Mais ce n’est pas vraiment une solution.[30] Non seulement le recyclage permet d’économiser de l’énergie [31] pour la fabrication de plastique (avec toutes les réserves d’usage quant à la qualité du plastique recyclé), mais brûler du plastique revient à brûler des ressources non renouvelables, avec la production de CO2 qui va avec.

Et c’est surtout là un faux débat. Une action utile serait de simplifier les emballages (moins de sortes de plastiques différents) et du coup, de faciliter et améliorer le recyclage. Mais le mieux serait surtout d’utiliser moins de plastique !

> Voir : Comment réduire la pollution due aux plastiques ?
 

Le plastique se retrouve en grandes quantités dans les océans

On retrouve beaucoup de plastique dans nos océans. La Fondation Ellen MacArthur estime ainsi qu’il y aura autant de kilos de plastique que de poissons dans les océans d’ici 2050.

Bientôt plus de plastique que de poissons dans l'océan
Source : Fondation Ellen MacArthur
 

On estime que dans nos océans, il y a :

  • 8 millions de tonnes de « gros déchets » de plastique. [32] Ce sont des déchets mal gérés, qui se retrouvent dans les océans (sacs en plastique, vaisselle, bouteilles…). Rien que pour la Méditerranée, on parle de 570 000 tonnes de déchets de plastique par an ! [33]
  • 0,8 à 2,5 millions de tonnes de microplastiques « primaires », venant de notre utilisation de matières plastiques. [34] Par exemple les microbilles contenues dans certains cosmétiques, les fibres de vêtements synthétiques qui se détachent quand on les lave ou encore l’usure des pneus de voiture. 

À cela il faut ajouter les microplastiques secondaires, qui proviennent des gros déchets qui se désagrègent.

> Lire aussi : Comment les microplastiques polluent-ils l'envrionnement ?

Le problème c’est que le plastique met très longtemps à se dégrader dans l’environnement, en particulier dans l’eau : de quelques dizaines d’années à plusieurs centaines d’années. [35] Cependant le processus de dégradation en conditions réelles est encore assez mal connu.

Temps de dégradation de divers déchets dans l'environnement
Source : SPF Santé Publique, sur base de chiffres NOAA

Même pour des plastiques censés être biodégradables, les conditions optimales ne sont pas réunies et le processus est lent.

> Lire aussi : Les bioplastiques sont-ils vraiment écologiques ?

Une partie de ces déchets finissent par se rassembler pour créer ce qu’on appelle « les continents de plastique ». Le plus connu est sans doute le vortex du Pacifique Nord : le « 7e continent ». Cette zone de rencontre de courants marins concentre les déchets de plastique en une gigantesque soupe de gros déchets et de microplastiques. [38]
 

Le plastique peut être nocif pour la santé

Quand on mange un aliment qui a été conservé dans du plastique ou quand un enfant mâchouille un objet. Voilà des situations où des composés peuvent migrer du plastique vers le corps et on se retrouve alors exposé à des substances (potentiellement) cancérigènes, à des perturbateurs endocriniens…

Ces migrations sont connues et encadrées par des normes. [39] Mais les normes changent et ce qui est autorisé aujourd’hui peut être interdit demain, par exemple le bisphénol-A qui a été interdit dans les biberons.

Le Conseil (belge) Supérieur de la Santé conseille d’ailleurs de privilégier le verre comme contenant alimentaire, plutôt que le plastique ou les conserves (car elles contiennent un revêtement en plastique à l’intérieur). Il déconseille aussi de réchauffer des aliments dans des contenants en plastique. [40]

> Lire aussi : Pourquoi et comment éviter les contenants en plastique ? et Alimentation : comment éviter les perturbateurs endocriniens ? 
 

Plus d'info

 

[1] Werner Boote a demandé à des habitants de sortir tous leurs objets en plastique. Á voir dans le documentaire « Plastic Planet » (2010). Extraits sur Youtube.

[2] 39,7 % en 2018 selon PlasticsEurope, l’association européenne des producteurs de plastique.

[5] http://europa.eu/rapid/press-release_IP-18-3927_fr.htm : 70% des déchets marins en plastique sont constitués d’objets en plastique jetables et de 27% d’engins de pêche.

[7] Le plastique en lui-même est composé de molécules produites par la distillation du pétrole : https://www.futura-sciences.com/sciences/questions-reponses/chimie-fabrication-plastique-5-etapes-6227/

[9] Tous déchets de plastique confondus.

[10] Source : http://ec.europa.eu/environment/circular-economy/pdf/plastics-strategy-brochure.pdf . Ce qui n’est pas recyclé est enfoui ou incinéré, en fonction des pays européens. En Belgique, il n’y a plus de mise en décharge de déchets ménagers. Les plastiques collectés et non recyclés sont donc incinérés (avec récupération d’énergie).

[12] Il s’agit du pourcentage de plastique collecté pour être recyclé, par rapport à ce qui est mis sur le marché.

[13] Avec récupération d’énergie, du moins en Belgique.

[16] Déchets plastiques : la dangereuse illusion du tout-recyclage -> https://theconversation.com/dechets-plastiques-la-dangereuse-illusion-du-tout-recyclage-90359

[17] Des retardateurs de flammes sont ajoutés dans certains plastiques, notamment dans les plastiques utilisés pour des électroménagers. Comme le plastique brûle bien, il faut lui ajouter des retardateurs de flamme. Ces retardateurs de flammes sont toxiques pour la santé.

[19] Exemples d’additifs sur le site de l’ECHA (agence européenne) -> https://chemicalsinourlife.echa.europa.eu/chemicals-in-plastic-products. Le projet Blastic détaille les substances utilisées dans les plastiques : https://www.blastic.eu/knowledge-bank/impacts/toxicity-plastics/

[20] Cités par Médor : https://medor.coop/fr/articles/recyclage-extrait-fostplus/. La bouteille de lait en PET opaque, même déposée dans le sac bleu, ne sera probablement pas recyclée, contrairement aux bouteilles « naturellement opaques » en PEHD, qui elles sont recyclées. Quand on vous dit que le recyclage du plastique, c’est compliqué ! Visuellement, difficile de distinguer les deux, même si, au toucher, la « consistance » est différente. Pour les plus motivé.e.s, le PET opaque a le numéro 1, le PEHD, le n°2 (comment reconnaître les plastiques ?)

[21] De manière générale, notamment – quand on parle d’emballages alimentaires – parce que le plastique pose de nombreux problèmes de qualité quand il s’agit d’utiliser du plastique recyclé pour fabriquer des matières amenées à entrer en contact avec des aliments. Mais ce n’est pas impossible -> http://www.processalimentaire.com/Emballage/Les-plastiques-recycles-reclament-leur-droit-au-contact-alimentaire-32073 . Le plastique n’est pas le seul concerné, le carton recyclé l’est aussi. Le verre ou le métal ne posent pas ce genre de problèmes.

[22] Les industriels du plastique cherchent à produire des matières plastique qui pourront être recyclées « à l’infini ». Mais actuellement, ce n’est pas le cas. Tout au plus fabrique-t-on des bouteilles de produits d’entretien avec la « crème » des PMC collectés (Le Soir, 26 avril 2019). La Suisse cependant y arrive, mais elle a une collecte séparée de bouteilles PET de boisson qui lui permet d’avoir une matière à recycler de très bonne qualité -> https://www.bafu.admin.ch/bafu/fr/home/themes/dechets/guide-des-dechets-a-z/bouteilles-en-pet.html.

[23] D’autant que le plastique recyclé… est plus cher que le plastique vierge.

[24] Partenaires de recyclage de Fost Plus (sac bleu) : https://www.fostplus.be/fr/node/405

[32] Fourchette de 4 à 12 Mt, souvent moyennée à 8 Mt dans la littérature. Plastic waste inputs from land into the ocean -> https://www.iswa.org/fileadmin/user_upload/Calendar_2011_03_AMERICANA/Science-2015-Jambeck-768-71__2_.pdf (2015)

[33] Étude WWF, juin 2019 -> https://press.wwf.be/un-traitement-inadequat-des-dechets-plastiques-fait-de-la-mer-mediterranee-un-egout-a-ciel-ouvert-selon-une-nouvelle-etude-du-wwf . Les déchets viennent principalement d’Égypte, de Turquie et d’Italie.

[38] Des organismes comme la Fondation Tara ou l’Expédition 7e continent font des recherches sur ces zones afin de mieux comprendre et documenter le phénomène.

Voir aussi

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