Afficher son engagement sur ses vêtements, pourquoi pas ? Primark et Shein proposent de magnifiques vêtements et accessoires avec de jolis messages à caractère publicitaire environnemental. On peut ainsi arborer fièrement un pull ou un sac avec « Precious Planet », « There is no Planet B » ou encore « Every Day is Earth Day » écrit dessus. Parfait pour rappeler l’urgence d’agir aux personnes que l’on croise. Et on peut acheter les yeux fermés car c’est certainement un signe que la marque s’investit dans le développement durable, la préservation des bébés phoques, le nettoyage du plastique recyclé dans les océans et, bien sûr, le droit des travailleuses et travailleurs à un salaire digne.

Si vous connaissez Primark et Shein, vous avez sans doute manqué de vous étouffer avec le café (équitable) que vous buviez en lisant ces lignes.

Si vous ne connaissez pas, on pourrait résumer en disant que c’est un parfait exemple de « plus c’est gros, plus ça passe ». Ces deux enseignes font ce qu’on appelle de la fast fashion (voire de l’ultra fast fashion). Les vêtements sont pas chers (mais vraiment vraiment pas chers), fabriqués dans des conditions opaques (au mieux), viennent de l’autre bout de la Terre et leur qualité est si faible que leur durée de vie est particulièrement courte.

Dans ces conditions, voir des sacs et des vêtements avec ce genre de slogans dans leurs webshops, ça fait un peu mal. C’est un peu comme si BMW faisait une pub sur l’environnement en mettant en scène un mastodonte (électrique) de plus de 2 tonnes et 544 chevaux.

Ahaha, non, ça serait vraiment ridicule !

(Ah zut, ils l’ont fait.)

Et est-ce que ces articles viennent d’une collection meilleure pour l’environnement ? Un genre de série limitée testée par ces entreprises de fast-fashion dans l’idée de faire évoluer leur offre à l’avenir ? Soyons fous, envisageons-le (on est quand même sympas, je trouve). Raté, rien ne l’indique.

Le sac « There is no Planet B » est fabriqué « en toile ». Nous voilà bien avancés, tiens. En toile de quoi, qui vient d’où, prffft, circulez, il n’y a rien à voir. Il coûte 3 € et y’a un slogan écolo dessus. Vous êtes difficiles aussi, vous voudriez EN PLUS savoir comment il a été fabriqué ? Sérieusement, vous exagérez. Allez chez Oxfam.

Shein est un peu plus prolixe en donnant la composition (c’est du plastique, surtout). Un label quelconque ? Non. Un pays de production ? Aucun. C’est de la génération spontanée ça monsieur, ça pousse sur des arbres verts en Greenwashingland (une contrée très vaste).

Plus drôle encore (enfin à condition de rire vert… euh jaune) : sur le site de Shein, on est bombardés de promos. 10 % à partir de 0,1 € d’achat ; 3 € de réduction si on laisse son mail et une promo temporaire (vous savez, avec un petit compteur qui vous stresse en vous disant qu’il ne reste plus que X minutes) qui donne encore droit à 10, 15 ou 20 % de réduction. Et ils trouvent encore le moyen de faire des ventes flash, des déstockages et des soldes.

Est-ce qu’à un moment on est payés pour acheter ? Je me le demande.

Sont-ce les pires dans le monde très décrié du textile ? Aucune idée, mais entre « mauvais » et « ultra mauvais », franchement, je ne suis pas sûr que ce soit pertinent d’hésiter. Ethical Consumer a tranché : ces deux marques obtiennent respectivement 0 (Primark) et 2,5 (Shein) au classement des marques de vêtements analysées.^[1] Coté sur 5 ? Non, sur 20. Ils ont aussi été épinglés par achACT récemment, sur le paiement des salaires des ouvriers et ouvrières.^[2]

There is no Planet B.

La bonne nouvelle c’est qu’il y a plein d’autres magasins où acheter des vêtements sans slogan, mais vraiment durables, eux !